Depuis la Révolution Culturelle (1966-1976), il n’est plus nécessaire d’obtenir l’autorisation de défiler dans les rues ou de s’assembler place Tiananmen. Par contre, la place est devenue le lieu privilégié où les discussions s’engagent naturellement, pour évoquer les événements du passé, pour commenter les articles parus dans le Quotidien du Peuple, ou pour manifester à propos de n’importe quel sujet.
Mais dès le moment où manifester n’est plus une obligation politique, comme ce fut le cas dans de la décennie précédente, cela va devenir une forme d’expression démocratique consacrée. En avril 1976, à la Fête des Morts, affrontements sur la place lors d’une cérémonie spontanée au lendemain des funérailles de Zhou Enlai et réprimée par la faction au pouvoir. Au moment de l’arrestation de la Bande des Quatre, en octobre de la même année, une manifestation de grande ampleur réunit tout une population soulagée.
Il faut savoir qu’à Beijing se concentre le pouvoir et les luttes entre familles politiques font rage: au gouvernement, l’opposition entre réformateurs et conservateurs est active depuis la mort de Mao Zedong (9 septembre 1976); étudiants et intellectuels se rangent naturellement du côté des réformateurs, alors conduits par Deng Xiaoping.
Le 9 décembre 1985, date anniversaire de l’invasion de la Mandchourie par les Japonais, manifestation contrastant avec les bonnes relations commerciales que le gouvernement chinois entend développer avec le Japon, mais à l’encontre du fort ressentiment animant la population.
Dès ce moment, la contestation devient un moyen sporadique d’expression et, en automne 1986, les étudiants commencent à se plaindre de leurs conditions de vie. A partir du 1er octobre, étudiants et citadins protestent contre une hausse générale des denrées alimentaires (le prix du riz double) destinée à améliorer le revenu des paysans. Ils ont trouvé en Hu Yaobing - alors chef du Parti - une attention bienveillante, mais ce dernier fera les frais de l’agitation.
Avril 1989, peu après la mort de Hu Yaobang dans des conditions jugées douteuses, des tensions ravivent la colère de la population; alors que la fracture entre Li Peng (Premier Ministre issu de la vieille garde et fils adoptif de Zhou Enlai) et Deng Xiaoping (ancien réformateur devenu "de facto" chef de la R.P.C.) est consommée. Les étudiants vont occuper la place en réclamant davantage que les 4 modernisations proposées par Deng, ainsi qu'une lutte plus soutenue contre la corruption.
Jusqu’au 4 juin fatidique où Deng, trompé par ses adversaires ou victime de ses propres terreurs, ordonnera une mise au pas qui va déraper.